15 Avril 2022
Clément Mathieu,
Triste planète, Dégradations et pollutions : le XXIe
siècle est mal parti
Recension : Albert Moxhet
Agronome et géologue, Clément Mathieu a, depuis 1960, travaillé en tant que
spécialiste de la science des sols en divers lieux du globe. Auteur de nombreuses
publications, il tire, dans Triste planète, un bilan qui prend l’allure
d’un examen de conscience nécessité par le lamentable état dans lequel nos
sociétés ont précipité cette terre qui doit nourrir une population en
croissance accélérée.
Confrontant des réalités souvent peu abordées dans les courants de
diffusion habituels, son analyse de pédologue mène plus loin dans la prise de
conscience de phénomènes trop souvent laissés dans l’ombre lorsqu’il est
question d’effets de serre, dérèglement climatique ou biodiversité. Au fil des
pages de cet ouvrage parfaitement accessible à tout public se dégage l’urgence
qu’il y a à revoir autrement notre relation aux sols, qui, pour l’alimentation,
restent le fondement de notre survie et que nous n’arrêtons pas d’agresser par
facilité et course au profit.
Avec énergie et concision, Clément Mathieu détaille, au départ de son
observation personnelle, les raisons qui, sans remettre en question le
dérèglement climatique et son excessive médiatisation, démontrent que, dès
aujourd’hui, l’urgence est ailleurs : dans la défense des équilibres
naturels et dans la lutte contre la destruction des ressources naturelles plus
que jamais indispensables à la subsistance des bientôt 9 milliards d’habitants
de notre petite planète. "Volontiers provocateur et iconoclaste, il n’hésite
pas à sortir des sentiers battus", comme le signale Pierre Faivre dans la préface, Clément
Mathieu implique dans son analyse un phénomène qui dépasse le rôle des
scientifiques pour s’imposer dans la finance et la politique. Effectivement, en
se fondant sur son expérience du terrain – sans jeu de mots – il amène le
lecteur à constater, au travers de l’étude de contextes différents, sous
diverses latitudes, combien est grave le déséquilibre engendré dans la nature
comme dans les populations par le multilatéralisme conjoint à l’application
généralisée de théories ultralibérales qui régissent aujourd’hui l’économie
mondiale. « L’Occident a placé l’homme face à la nature en conquérant
au lieu de l’immerger complètement, tout entier, dedans. Du coup, la vie n’est
plus un déploiement doux et harmonieux, mais une guerre contre nous-mêmes,
puisque la nature ne fait plus partie du jeu », renchérit le Docteur Pascal
Ponsin dans sa postface.
Le sous-titre que Clément Mathieu a donné à cet ouvrage, Dégradations et
pollutions : le XXI e siècle est mal parti, est un constat
dramatique, mais il implique aussi la recherche d’une correction à apporter à
l’itinéraire. Les problèmes critiques provoqués par la pandémie, mais aussi
tout dernièrement par la guerre russo-ukrainienne, font percevoir avec une
acuité accrue l’urgence d’une coopération non seulement entre les dirigeants
des grandes puissances, mais aussi – et c’est lié – une mobilisation des décideurs
économiques pour la sauvegarde du patrimoine naturel. Et cela commence par une
formation libératrice des agriculteurs. (Éditions L’Harmattan, Paris, 2021)
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